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- Conférence du 13 février 2007
"Carnaval et religiosité dans les Andes équatoriennes", Dijon, 2007
Résumé de ma conférence donnée à Dijon, le 12 février 2007, dans le cadre de l'Association France-Amérique-Bourgogne.
Carnaval et religiosité dans les Andes: les métamorphoses d’un saint.
Pourquoi saint Jacques, patron de l’Espagne catholique, est-il devenu, dans une région de la cordillère des Andes, l’allégorie et le saint patron du Carnaval?
Saint Jacques est, depuis le Moyen-Age, un saint aux personnalités multiples. Apôtre, mais également pèlerin, il adopte, à l’époque de la Reconquête espagnole, les traits d’un cavalier qui pourfend le ciel sur son cheval blanc apportant aux chrétiens la victoire sur les musulmans. Les légendes sur ses apparitions se multiplient.
A leur tour, les Conquistadors imposent aux peuples amérindiens la figure de leur champion. Ses interventions miraculeuses s’accompagnant toujours de violentes déflagrations qui rappellent celles du tonnerre, les populations le confondent rapidement avec les dieux incaïques, Viracocha ou Illapa, dont le retour doit les aider à résister aux nouvelles croyances. Car ces divinités chtoniennes, associées à la foudre et à la pluie, sont aussi considérées comme les ancêtres de leurs communautés.
Objet d’un culte désormais syncrétique, saint Jacques incarne aujourd’hui, dans les Andes équatoriennes, et de manière plutôt inattendue, la figure emblématique du Carnaval. Quel sens renferme cette étrange métamorphose fondée sur des rêves et des visions qu’alimente toujours l’image du cavalier surgissant au sommet d’une colline? Quels en sont les enjeux, les défis?
Toujours perçu par les populations indiennes comme l’esprit d’un ancêtre émanant des accidents de la nature, le saint doit apporter, en échange des rituels d’offrandes qui lui sont adressés, prospérité et régénération. Mais récemment, des Indiens ont préféré remplacer les rites du Carnaval par des manifestations folkloriques. Celles-ci ont perdu toute efficacité symbolique mais représentent pour eux un moyen de revendication de leur identité “ethnique”, dont ils se sentent, depuis longtemps, dépossédés.
A l’inverse, pour les populations urbaines, dont la religiosité est plus métissée encore, le Carnaval est l’occasion, à travers le culte de son “saint patron”, d’affirmer leur identité “catholique”. Au grand dam de l’Eglise officielle que l’aptitude des fidèles à instrumentaliser les référents religieux incite aujourd’hui à remettre de l’ordre dans des croyances considérées comme trop “populaires”.
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